Le savoir est une arme.
À travers la croissance foudroyante des importations chinoises aux États-Unis, une enquête fouillée sur la première chaîne américaine de grande distribution, qui constitue un cas d’école du
capitalisme mondialisé.
Avec un chiffre d’affaires de 265 milliards de dollars en 2004, l’entreprise Wal-Mart, fondée dans les années 60, est devenue la première chaîne de grande distribution du monde.
Partant de la triomphale assemblée générale des actionnaires tenue la même année, cette enquête de l’émission américaine Frontline, qui fit grand bruit à domicile, entreprend de disséquer les
origines d’un succès en expansion constante, avec une question simple : "Wal-Mart fait-il du bien à l’Amérique ?"
Ce faisant, le journaliste Hedrick Smith expose avec autant de rigueur que de simplicité les présupposés et les conséquences du capitalisme mondialisé.
Car le géant de la distribution, qui a su anticiper dans les années 90 l’expansion de l’électronique grand public, doit l’essentiel de ses profits à l’ouverture de la Chine aux investissements
américains.
Ayant conquis une place de leader sur le marché national par une savante politique de discount - moins avantageuse pour le consommateur qu’il n’y paraît, comme le révèle ici un ancien cadre de
l’entreprise -, Wal-Mart a pu imposer à ses quelque six mille fournisseurs des coûts alignés sur la concurrence chinoise, avec des méthodes de négociation ultra-agressives.
Progressivement, la majorité d’entre eux a dû choisir entre délocaliser sa production en Chine ou renoncer à ce client vital.
Une évolution significative des relations commerciales sino-américaines dans leur ensemble, avec le déficit abyssal qui les caractérise : désormais, les États-Unis, "comme un pays du
tiers-monde", vendent à la Chine des matières premières et importent ses produits manufacturés avec, à la clé, un déficit de plus de 200 milliards de dollars par an.
-Wal-martingale :
Au moment où ce film a été tourné, Wal-Mart n’avait pas encore été condamné par la justice de son pays à de lourdes amendes pour violation du code du travail.
Mais pour cette entreprise "nouveau modèle", parfois présentée comme le premier employeur au monde, il ne s’agit là que d’un épiphénomène.
Des petites villes de l’Amérique profonde sinistrées par le chômage aux chaînes de travailleurs sous-payés de Shenzhen, des Caddie bien remplis de consommateurs enthousiastes au détail des
tractations commerciales, sans oublier les analyses contradictoires de différents économistes, les auteurs dressent un portrait éloquent de la politique Wal-Mart, véritable cas d’école pour
l’idéologie néolibérale.
Qui s’exprime ici par la voix d’un libertarien du Cato Institute, inspirateur de l’équipe Bush : puisque le marché est bon pour l’homme, estime-t-il en substance, Wal-Mart est forcément bon pour
l’Amérique.