Cette action en justice fait suite à plusieurs interpellations, restées vaines, pour tenter de faire la lumière sur ce drame. L'ONG Human rights watch avait, dès juillet 2011, demandé des éclaircissements à l'OTAN et aux gouvernements des pays participant à l'opération - Etats-Unis, Canada, France, Grande-Bretagne, Italie, Espagne. Un rapport d'enquête d'un parlementaire du Conseil de l'Europe (Le Monde du 30 mars 2012) a récemment dénoncé une défaillance collective dans cette affaire sans pouvoir établir de responsabilités précises.
Le bateau, parti de Tripoli, avait été survolé par un avion français, puis, en panne de carburant, avait dérivé pendant quinze jours dans une zone où croisaient de très nombreux navires militaires. Malgré la diffusion d'appels de détresse par les gardes côte italiens, aucun navire civil ou militaire ne s'est dérouté. Des chercheurs de l'université de Goldsmiths, à Londres, ont reconstitué la trajectoire précise de l'esquif, un document joint à la plainte.
63 migrants morts en Méditerranée : une coalition d’ONG dépose plainte contre l’armée française
Un an après la mort de 63 migrants dans un bateau au large de la Libye, des survivants, avec le soutien d'une coalition d'ONG, ont déposé, ce mercredi 11 avril 2012, en France, une plainte
mettant en cause l'armée française pour non-assistance à personne en danger.
C’est l’essentiel due ce communiqué de presse conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH), du Groupe d'information et de soutien des immigrés (GISTI) et de
Migreurop. «Mars 2011, le chaos s'installe en Libye et des milliers d'étrangers sont contraints de fuir le pays pour échapper aux violences. Parmi eux, 72 personnes d'origine éthiopienne,
érythréenne, nigérienne, ghanéenne et soudanaise, embarquent dans la nuit du 27 mars à bord d'un zodiac à destination de l'Italie. Quelques heures après leur départ un avion de patrouille
français survole leur bateau et le signale aux gardes-côtes italiens. Leur périple se transforme très rapidement en cauchemar. Ils manquent de carburant, de nourriture et d'eau potable et
perdent le contrôle de l'embarcation. Par téléphone, ils lancent un S.O.S. reçu par les garde-côtes italiens qui adressent alors des messages de détresse aux bâtiments présents en mer
Méditerranée en indiquant leur localisation. Ces appels seront renouvelés toutes les 4 heures pendant 10 jours. Les eaux au large de la Libye sont alors massivement occupées par les forces
militaires qui disposent d'équipements sophistiqués. L'embarcation des migrants est survolée à deux reprises par des hélicoptères. L'un d'eux larguera même quelques bouteilles d'eau et biscuits
aux passagers avant de repartir. Puis, rien!
Après 9 jours de dérive, alors que de nombreux occupants sont déjà morts, les migrants croisent un navire militaire. Ils signalent leur détresse et montrent les corps des bébés morts. Mais
personne ne leur viendra en aide. Le zodiac est rejeté sur les côtes libyennes après 15 jours de dérive. A son bord, seuls 11 survivants, dont 2 meurent peu après le débarquement en Libye. 63
personnes, dont 20 femmes et 3 enfants, ont trouvé la mort faute de secours.
Cette affaire, symbole de l'indifférence de l'Europe envers les réfugiés, est aujourd'hui portée par certains survivants devant la justice pénale française. Aujourd'hui, une plainte contre X a
été déposée pour omission de porter secours à personnes en péril devant le Tribunal de grande instance de Paris, dans sa formation spécialisée en matière militaire. Il appartiendra à la justice
française de faire la lumière sur la responsabilité de l'armée française qui, engagée en Libye pour protéger les populations civiles, a omis de se porter au secours de ces exilés. Ayant
nécessairement reçu les messages de détresse, tout porte à croire que les forces armées françaises ont manqué à leurs obligations internationales et nationales de protéger la vie, tout
particulièrement la vie en mer.
Le mépris et l’indifférence réservés aux personnes qui tentent de gagner l'Europe pour sauver leur vie sont intolérables. La Cour européenne des droits de l’Homme l’a récemment affirmé avec
force dans un arrêt du 23 février 2012. Nos organisations, qui soutiennent les survivants de cette tragédie, attendent de la justice pénale française qu’elle sanctionne la violation de
l'obligation de porter secours à personnes en péril, et considèrent que rien ne peut justifier qu’on laisse impunément mourir en toute connaissance de cause un être humain en détresse.»
SOURCE : http://www.echoroukonline.com/ara/articles/126723.html
Aller plus loin : Traqués: Enquête sur les marchands d’armes numériques - ou comment la France à permis à Khadafhi de surveiller les opposants au pouvoir et bien plus.. (Vidéo)[VF]