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1 juillet 2012 7 01 /07 /juillet /2012 13:11

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Ils ont 30 ans aujourd’hui, Vincent Maillard les a filmés durant quinze ans, de la préadolescence à l’âge adulte. Une expérience rarissime, quasi-inédite à la télévision, raconte le parcours de Raphaël, Sabrina et Stéphanie.

 

 

 

 

Raphaël, Sabrina, Stéphanie et Laura sont des jeunes gens simples, humbles, invisibles, qui se débattent dans le quotidien étouffant et banal de la France d’aujourd’hui. L’histoire commence en 1995. Ils ont 13 ans et sont élèves d’une classe de "Segpa", cette section spécialisée des collèges dans laquelle on relègue les enfants dits en « échec scolaire ». Le film les suit durant leur scolarité, les voit grandir, devenir de jeunes adultes, décrocher leur CAP. Puis, ils vont devoir chercher du travail, tenter de devenir autonome, de s’insérer dans la société. Travailler, se marier et faire des enfants... en cheminant sur la route de ce projet minimum, il y a quelques engouements et même des joies fugitives, mais aussi de lourdes et fréquentes déceptions. Pendant toutes ces années, leurs destins vont se dessiner, comme dans un film de fiction. Une fiction implacable : quinze ans plus tard, le temps des rêves est révolu. Ils ont 30 ans, si la vie ne leur a fait aucun cadeau, ils l’affrontent, jour après jour, sans se plaindre, et malgré la lassitude, perdure toujours leur avidité de bonheur.

 

 

Note de Vincent Maillard :

 

"En 1995, lorsque j'ai commencé à filmer cette classe d'élèves de Segpa, Raphaël, Sabrina, Stéphanie et les autres appartenaient à ce "continent noir" de l'Education nationale, à cette frange oubliée de la population française, comme invisibles, ils n'entraient dans aucune "case" médiatique susceptible de les rendre intéressants à l'œil d'une caméra… Sans réel discours, sans aspérité immédiate, sans traumatisme évident, ils étaient l'inverse du résultat d'un casting pour "émission de société". Telle a été ma démarche : aller à l'inverse d'un processus de "casting". Prendre le temps nécessaire pour raconter ces petites vies sans les avoir sélectionnées. Parce que toute vie mérite d'être contée. Parce que leur absence sur la scène médiatique et politique est aujourd'hui au cœur du problème.


Je les ai vus grandir, devenir de jeunes adultes, se battre pour s’en sortir quand, comme eux, on est issu d’un milieu social et familial peu favorisé. Ce film est la chronique sur le long terme de trois jeunes gens simples, acharnés à éviter, à ignorer le précipice au bord duquel ils cheminent. Le monde des adultes, leurs parents absents, leurs professeurs fatigués, leurs émissions de télévision clinquantes, leur ont-ils appris qu'une vie se bâtit plutôt qu’elle ne se subit ? Apparemment pas.

 

Pendant toutes ces années, les personnages vont évoluer, se construire en se heurtant à la réalité. A travers eux, c’est le portrait en creux d’une société dans son ensemble qui va apparaître, une société de plus en plus implacable et figée dans l'obsession normative de la consommation. D'enfants, ils sont devenus adultes puis parents, et reproduisent le seul schéma qui leur a été proposé.

 

Désespérante inertie culturelle, insoutenable fatalité de la reproduction sociale. Leurs trajectoires de vie semblent bien linéaires. Voilà le ressort dramatique essentiel du film, cette banalité qu'ils supportent, non pas par ignorance, mais par une forme de courage résigné. Sabrina, Stéphanie et Raphaël sont les grands oubliés de notre époque pour cette raison précise, ils ne rentrent dans aucune de ces cases médiatiques réservées aux "jeunes" ou aux "précaires" : ni délinquants, ni handicapés, ni victimes d'abus criminels ou d'une actualité violente, pas même réduits à la misère extrême. Ces anciens élèves de "Segpa", devenus ouvrier au S.M.I.C. (Raphaël), intérimaire de la grande distribution (Stéphanie), ou "femme au foyer RMiste" (Sabrina) constituent malgré tout les gros bataillons d'une population silencieuse en voie de "douce marginalisation". Aujourd'hui ils sont toujours dans cette situation "entre deux eaux", entre la pauvreté et la misère, entre l'emploi et le chômage, entre les parents et la solitude, entre la ville et la campagne, avec pour préoccupation lancinante le moyen de boucler le mois.


Dans leur extrême simplicité, ils expriment l'implacable mécanique des difficultés sociales et des enfermements culturels d'aujourd'hui. Si aucune caméra de télévision de reportage, ou de "magazine", ne s'attardera jamais sur ces jeunes gens "fades", "qui n'ont rien à dire", qui sont "tellement conformistes", "tellement soumis", je crois que là réside, et résiste, la force de la démarche documentaire : prendre le temps de comprendre ces trajectoires sur la longueur. Le monde des adultes leur a appris depuis toujours à sauvegarder l'essentiel, la survie matérielle. Pour le reste : rien, la télévision… Ils sont tellement influençables qu'ils répètent souvent les discours entendus. Aujourd'hui, en 2011, ces trois-là sont entrés comme malgré eux dans le monde des adultes. Si personne ne peut dire à coup sûr ce que la vie leur réservera, ce qui est certain, c'est que la place, la toute petite place qu'ils occupent, en bas de l'échelle sociale, cette place là ne bougera plus. Stéphanie se tait encore plus que lorsqu'elle était adolescente, elle a pris ce pli du souci entre les yeux, elle a baissé les bras.

 

Le rêve de Sabrina de construire la vie de famille heureuse qu'elle n'a pas connue s'est écroulé. Du papillon insouciant qu'elle était, il ne reste plus qu'une agitation inquiète. Le papillon est pris au piège dans un bocal. Tous ses espoirs sont désormais reportés sur sa fille.

 

Quant à Raphaël, il se bat, jour après jour, année après année, parce que ses années à lui, à cause de la maladie, sont comptées. Aujourd'hui, Raphaël, Sabrina et Stéphanie sont beaucoup moins joyeux qu'au moment de leur adolescence, ils sont pourtant restés attachants, ils sont restés les mêmes, eux-mêmes. Raphaël est ce genre de personne dont on dit qu'il a "une petite vie pas facile, c'est sûr". Pourtant Raphaël est la personne la plus généreuse et la plus avide de bonheur que je connaisse.

 

Là est tout le sens du film, derrière cette apparente "insignifiance", derrière l'écorce du quotidien, derrière ces silences ou ces phrases "attendues et convenues", perdure le noyau de leurs personnalités et de leur humanité, vivante, généreuse, touchante."

 

Crédit photo © DR.

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commentaires

L
http://www.chemindevie.net/article-mr-happy-man-119364442.html<br /> <br /> J'adoooore !!!<br /> <br /> Aimer et donner de l'amour...simplement, cet homme est riche de ça, une petite vidéo qui fait du bien et vous donne le sourire.<br /> Laisser parler son coeur, oh combien difficile dans ce monde qui marche sur la tête.
Répondre
O
Superbe, merci pour la phase &quot;j'ai un sourire de gosse au coin des lèvres&quot; lasorcièrerouge, merci.

Citation

« Il fut débattu puis décidé que la peur devrait être propagée et entretenue au niveau mondial afin que l’attention reste cristallisée sur le négatif tout en empêchant l’expression positive de l’authenticité.

 

Tandis que les gens deviendraient de plus en plus craintifs et manipulables, leur capacité à penser librement et à exprimer leur authenticité décroîtrait.

 

Le contrôle de l’esprit interdisant clairement toute expression de l’authenticité, l’évolution de l’esprit humain diminuerait ainsi en même temps que la liberté de penser, lors que celle-ci fait l’objet d’un continuel bombardement alliant terreur et négativité. »

 

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