Longtemps confinés aux ventes de charité et aux boutiques " bobo ", les produits du commerce équitable sont devenus en quelques années des produits grand public. Les voici désormais disponibles en grande surface. Toutes les enseignes s'y sont mises, avec un boom inespéré : 40% d'augmentation des ventes par an. Après le café et le chocolat, la gamme s'est largement diversifiée pour s'installer dans tous les rayons, des cosmétiques aux fleurs, des bananes aux jeans.
Le consommateur citoyen peut donc à priori se féliciter de cette percée militante dans le monde du business.
En toute logique, plus les riches consommeront équitables, plus des paysans pauvres, payés enfin à un prix juste, auront accès au développement. Ce n'est malheureusement pas si simple.
Certes, l'augmentation du marché de l'équitable permet à des petites coopératives de développer leur production et de s'agrandir. Mais à quel prix ? Deux mondes, deux logiques tentent de coexister.
D'un côté, la nécessité de faire du volume, de l'autre la volonté de produire à échelle humaine, en respectant l'Homme et la nature.
Pour comprendre à qui profite cette coexistence, voici l'histoire comparée de trois tablettes de chocolat fabriquées à partir de fèves de cacao équatoriennes. Elle révèle bien des contradictions entre grande distribution et commerce équitable car finalement, quelle que soit la profession de foi des grandes enseignes, il ne s'agit pour elles que de gagner de l'argent.
Ce nouveau mode de consommation, que l'on assure respectueux, tient-il vraiment ses promesses pour les petits producteurs des pays du Sud ? Hubert Dubois est allé mener l'enquête, dans la grande distribution en France et en Equateur.
Les produits équitables ne représentent que 0,01 % du commerce mondial. Un chiffre dérisoire qui témoigne de manière encore bien marginale de leur progression dans les pays développés, principalement en Europe et en Amérique du Nord. Rien que pour la France, leur consommation a ainsi fait un bond de 27 % (*) en 2007 ! Estampillés notamment Max Havelaar et vendus environ 20 % plus chers que les produits classiques, jus de fruits, café, chocolat, thé, bananes ou fleurs conquièrent en effet une place de plus en plus large dans les linéaires de la grande distribution.
Plébiscité par les consommateurs, cet appétit de citoyenneté, qui ne représente encore que 1 % du chiffre d'affaires des enseignes hexagonales, progresse sans relâche. Une chance, assure Tristan Lecomte, le président d'Alter Eco, qui se souvient : « J'ai démarré en ouvrant une boutique, qui n'a pas marché. Puis une seconde, qui n'a pas marché. J'ai ensuite ouvert un site Internet : il n'a pas marché. Je suis donc allé en grande distribution parce que c'est là que l'on peut réussir en commerce équitable. En atteignant des volumes de vente très significatifs, on a amélioré notre fonctionnement et, aujourd'hui, nous payons significativement plus les producteurs. » Une meilleure rétribution des producteurs des pays du Sud, tel est en effet le credo du commerce équitable, sorti du circuit exclusif des associations solidaires et des magasins spécialisés.
Certains, pourtant, comme Artisans du monde, tiennent à rester en retrait, rétifs aux risques contre-productifs de cette exposition grand public : « On voit aujourd'hui, note ainsi Laurent Levard, le délégué général de son réseau de 160 boutiques, que les acteurs de la grande distribution ont en fin de compte le même type de comportement avec leurs fournisseurs de commerce équitable qu'avec leurs autres fournisseurs : ils font des pressions pour que les prix baissent », observe-t-il.
Source et plus : centpourcentnaturel
Vu sur : ArgentDette